Ce fut une idée dont l'heure était venue. C'est ainsi que Priscilla Coates décrit les humbles débuts du CAN, fondé il y a une vingtaine d'années dans la foulée des meurtres et suicides en masse du Guyana, chez les adeptes de Jim Jones. Le concept en était simple: établir une association sans but lucratif d'envergure nationale pour aider les gens pris dans le tourbillon grandissant de la scène sectaire. L'acronyme CAN existe encore, au moins sur le papier. Mais près d'un quart de siècle plus tard, nul membre fondateur n'y travaille plus: quand les gens téléphonent au CAN actuel, c'est un membre de la scientologie qui lui répond. Plutôt que de mettre en garde les gens au sujet des sectes, les opposants disent que le nouveau CAN leur fait de la publicité. Comme le dit un critique, c'est comme si l'association "Laissez-les vivre" prenait le planning familial en charge.
L'histoire de la manière dont la très controversée
église de scientologie - que le Time qualifia de "secte
avide d'argent" - prit le contrôle du groupement anti-sectaire
, son ennemi juré - est aussi bizarre que la science-fiction
du fondateur de l'église, Hubbard. C'est aussi un bon avertissement
envers ceux qui s'élèvent face à la scientologie,
avec son penchant pour les tribunaux, et sa réputation de dure
à cuire face à ceux qu'elle appelle "suppressifs",
c'est à dire ceux qui ont ridiculisé ses enseignements.
Ces dogmes comprennent l'histoire hubbardienne prétendant que
les humains sont constitués de conglomérats d'esprits
renommés "thétans", bannis sur terre il y
a 75 millions d'années par un tyran galactique nommé
Xenu. Hubbard, auteur de science fiction de gare mal noté dans
la Navy, trouva la célébrité en 1950 lorsqu'il
émit le concept de la Dianétique, alors présentée
comme une science moderne de la santé mentale. Elle est encore
au coeur de la pratique scientologue. On y trouve aussi un appareil
genre détecteur de mensonges simplifié appelé
électromètre, censé mesurer les changements de
charge électrique à la surface de la peau, pendant que
le sujet aborde des choses intimes de son existence. Hubbard disait
que les ennuis venaient d'aberrations mentales nommées "engrammes"
et que les séances de "conseil" à l'électromètre
pouvaient aider à s'en débarrasser. Les scientologues
appelent ce procédé (très cher) de nettoyage
du mental "l'audition" ou "auditing". Mais au
cours des années 70, le fisc américain fit quelques...
audits de son cru et accusa Hubbard de rafler des millions de dollars
à l'église, de les blanchir dans des sociétés
bidon, et de les expédier vers des comptes suisses. Bien qu'il
mourut avant que l'affaire ne s'achève, sa femme et une dizaine
d'autres pontes de la secte allèrent en prison début
des années 80 pour cambriolage, infiltration, et écoutes
illégales portant sur une douzaine d'agences officielles ou
privées, afin de faire cesser leurs investigations.
Dotée de vastes quartiers sur Sunset Boulevard à Hollywood, l'église à rassemblé une série d'adeptes étoilés: on y trouve John Travolta, Tom Cruise, Kirstie Alley, le musicien Chick Corea, et le chanteur Isaac Hayes. Afin de se débarrasser de sa réputation de groupe marginal, elle a engagé la puissante affaire de relations Publiques Hill & Knowlton, acheté quantité de spots télévisés, d'annonces dans la presse, et recruté des universitaires ou autres professionnels par l'entremise d'un réseau de consultants dont les liens scientologiques restent typiquement cachés. Ses membres comprenent aussi des personnalités des média: Greta Van Susteren - correspondante légale de CNN et son mari John Coale, important avocat washingtonien. Ils ont d'ailleurs joué un rôle mineur dans l'assaut scientologue contre le CAN, en représentant une dame de l'Ohio qui poursuivait une organisation de déprogrammation dite "Wellspring", dont le patron était également membre du conseil du CAN.
Dans la mire, les officiels de l'ancien CAN disent qu'ils auraient dû voir venir l'assaut de la scientologie - leur engagment suspecté dans des pratiques de kidnapping et de déprogrammation d'individus entrés dans des sectes ayant aussi créé une controverse. Ils auraient surtout dû prèter garde après qu'un avocat scientologue éminent de Los Angeles ait attaqué lors d'une plainte contre le CAN en banlieue de Seattle. Nul n'aurait imaginé que cette plainte, au nom d'un jeune homme nommé Jason Scott, qui avait été kidnappé et déprogrammé d'une secte évangélique, produirait quelques 5,2 millions de dollars de dommages et précipiterait la ruine du groupe anti-sectes. Ils n'auraient pas non plus pensé que le logo, les meubles et le numéro de téléphone du CAN auraient été soldés aux enchères par ordre du juge des saisies ce jour de 1996, et vendus à un scientologue jailli de nulle part pour placer l'enchère finale.
Mais l'indignité ultime attendait encore les croisés anti-sectaires au début 1999, dans un tribunal de Chicago. Ayant déjà vaincu le CAN, pris son nom, et expédié ses bureaux d'Illinois tout près des quartiers scientologues d'Hollywood, les avocats liés à la scientologie n'eurent qu'à faire un pas pour prendre possession des dossiers sensibles de vingt années de travail du CAN. Répartis dans plus de 150 caisses, il y avait là les noms, adresses, et informations détaillées sur des milliers de personnes ayant demandé de l'aide au CAN pour aider un ami ou un parent. La liste des organisations que ciblait l'ancien CAN se lit comme un Who's Who de la culture marginale: cela va du Ku Klux Klan et des Nations Aryennes à des douzaines de groupuscules évangélistes ou fondamentalistes, à des Eglise de Satan, Eglise de l'Unification de Moon, en passant par des adeptes de partis politiques extrémistes comme celui de Lyndon LaRouche, et bien sûr, à l'église de scientologie.
Un juge avait antérieurement exclus ces matériaux de la liquidation, ordonnant qu'ils soient retenus pendant que les anciens officiers du CAN cherchaient une protection légale afin de les conserver hors de portée de l'ennemi. Mais les juges de faillites sont souvent méfiants dès qu'il s'agit de passer les documents d'un groupe à un autre, surtout s'il s'agit de concurrents. Hélas, les avocats semblent avoir établi leur plan de campagne: rachetant les jugements portés contre le CAN ruiné, un individu de Los Angeles nommé Gary Beeny devint le principal créditeur de la faillite. Et c'est à Beeny que le juge donna en mai les dossiers, derniers vestiges des ressources anciennement abondantes du CAN. Beeny est scientologue, selon le magazine American Lawyer. Il eût tôt fait de transmettre les documents à un groupe sous contrôle scientologique, la Fondation pour la Liberté Religieuse. La fondation en question était déjà devenue l'entité officiellement autorisée à faire fonctionner le nouveau CAN, lorsqu'un autre scientologue de Los Angeles, Steven A. Hayes, avait racheté le logo et les autres biens. L'avocat qui représentait Beeny n'était autre que la porte-parole célèbre, le scientologue Kendrick L. Moxon. C'est d'ailleurs lui qui représentait Jason Scott dans l'affaire de faillite du CAN. (Scott déclare maintenant qu'il a servi de chèvre aux scientologues, et a rénié Moxon).
Impensable, mais vrai, le président de la Fondation en question, également président du nouveau CAN, n'est autre qu'un pasteur auto-déclaré baptiste : George Robertson. Autre pièce de cette symétrie inversée, le directeur du nouveau CAN n'est autre que Andy Bagley, cet hurluberlu fut secrétaire d'Hubbard en son temps, et meneur de l'antagonisme contre l'ancienne directrice de l'ancien CAN, Cynthia Kisser. Bagley avait commencé à s'occuper de Mme Kisser alors qu'il dirigeait une des branches des opérations spéciales de la scientologie, la branche "CIA" scientologue de Kansas City. "Nous parlons ici d'une conspiration de larges proportions, d'une tragédie véritable", déclare le Dr Ed Lottick, médecin Pennsylvanien et directeur de l'ancien CAN [ndt: dont le fils s'était suicidé en scientologie]. "Maintenant qu'ils ont les dossiers, Dieu sait quel désastre ils vont en tirer."
Lottick n'attendrait pas longtemps en effet.
Depuis leur transfert à Los Angeles voici deux mois, les scientologues
du nouveau CAN ont entamé la tâche délicate d'organiser
et archiver les dossiers. Ils désirent en faire passer des
copies aux nombreux groupes visés par l'ancien CAN, dit Nancy
O'Meara, cadre et trésorière du nouveau CAN. [ndt:
à mon avis, les scientos ne donneront que ce qu'ils veulent
à ces groupes, et non seulement ils les feront probablement
payer cher ce travail, mais ils garderont certaines pièces
secrètement comme arme de chantage future contre ces concurrents].
Scientologue depuis 25 ans, O'Meara considère l'ancien CAN
comme un ramassis de semeurs de haine, "faisant règner
la terreur", et ne cache guère son sourire à l'idée
que des groupes visés par l'ancien CAN puissent user de ces
matériaux pour entreprendre leurs poursuites en justice, ou
même, des procès au criminel.
Le principal lieutenant du gourou déjà emprisonné Tony Alamo, - flamboyant prècheur des rues qui combinait ses avertisssements messianiques à une business rentable qu'il effectuait en veste de cuir à sequins, a pris l'avion depuis l'Arkansas pour obtenir des copies des dossiers d'Alamo. "Les documents sont étonnants, dit O Meara: ils vont ouvrir pas mal d'yeux, et nous pensons qu'ils vont attirer passablement les médias." Bien sûr, ils sont gardés au secret... Questionnée plus précisément, elle renvoie les questions portant sur ces dossiers vers l'avocat scientologue Moxon, qui serait le responsable de ces fichiers après avoir été la clé de l'effondrement de l'ancien CAN. Mais lorsqu'on l'a approché, Moxon s'intéressait davantage à poser des questions sur notre article qu'à discuter du CAN. "J'ai lu des tas de choses merdiques [sur la scientologie] dans le New Times, nous a-t'il dit, avant de raccrocher le téléphone: je ne vous fais pas confiance."
(Résumé du passage non traduit: le scientologue a emporté l'affaire de saisie et vente aux enchères pour 20000 dollars]
For the old Cult Awareness Network, the end was swift.
Ben Hyink, who represented CAN in the bankruptcy, recalls the somber mood on that day in 1996 when he escorted Cynthia Kisser into a Chicago courtroom on what proved to be a fool's errand. Kisser had spent nine years at the helm of the organization, and, like the captain of a sinking ship, desperately wanted to cling to it for as long as possible. She had arrived naively hoping to buy the group's assets. Even more naively, she hoped that they wouldn't cost much. Even if successful, hers would have been a sad mission. The aim was to scoop up the trade name, post office box, help-line number, and service mark merely to retire them and thus put the beleaguered CAN out of its misery. But there was another suitor in the courtroom that day -- Steven Hayes, the Scientologist, who had come all the way from L.A. with different ideas. The bidding started at $10,000, and a nervous Kisser quickly offered $11,000. Hayes raised her $1,000. "I will bid $13,000," she said. "Fourteen," snapped Hayes. Kisser kept going -- to $19,000. But when Hayes upped her again, Kisser responded: "No more." The trustee conducting the sale asked if she'd like to take a break, and she said that would be fine. He told her that if she wanted to make another offer to come back within three minutes. But as Hyink recalls, the pause was pointless. Kisser could go no higher. "I will accept the offer of Mr. Hayes for $20,000," court records show the trustee proclaimed.
C'était fini.
Mais il avait fallu des années aux scientologues pour venir
à bout du CAN. Depuis 1991, le CAN avait dû faire face
à une cinquantaine de plaintes déposées par des
scientologues devant des tribunaux d'états ou fédéraux,
dans tout le pays. Mme Priscilla Coates, ancien chef de la section
de Los Angeles, se souvient avoir reçu une demi-douzaine de
plaintes en quinze jours, courant 92. "Ca devenait tellement
habituel qu'on avait l'impression de connaître déjà
les plaignants, dit-elle. Simultanément, les scientologues
déposaient des douzaines de plaintes pour discriminaion devant
les commissions de droits de l'homme, le tout exigeant une batterie
d'avocats.
Bien que ce soient des scientologues individuels qui aient déposé les plaintes, la plupart parlait un language presque identique. Autre dénominateur commun: une bonne part avait passé par le cabinet de Moxon. Les plaintes étaient de deux sortes: soit on leur avait refusé de devenir membre d'un CAN local, ou bien on les avait refusés à la conférence annuelle du CAN. "Il aurait fallu être idiot pour ne pas constater l'orchestration de l'ensemble", dit Dan Leipold, l'avocat de Santa Anna ayant défendu le CAN dans trois douzaines de plaintes, et qui a souvent pris à partie la scientologie. Ses dossiers contenaient des tas de lettres écrites par des scientologues au CAN, demandant à faire partie de l'association. Dans nombre d'entre elles, le language est quasi identique, comme si on les avait pondues à partir d'un modèle. L'étendue de la conspiration devint claire, dit Leipold, lorsqu'il commença à faire déposer les plaignants individuellement et qu'il découvrit que certains n'avaient même pas demandé à faire partie du CAN avant leur plainte. D'autres, dit-il, ignoraient qui payait leurs avocats ou comment ces avocats avaient été sélectionnés. Pour Coates, la campagne de lettres ne faisait pas mystère: "Rien de spontané ici, les lettres commencèrent à arriver par sacs, toutes disant la même chose : pas besoin de sortir de St Cyr pour voir qu'ils nous étaient sur le dos". Bagley, l'ancien secrétaire d'Hubbard, le confirme. Après avoir été repoussé plusieurs fois par Kisser qui voulait discuter des "vieux mensonges fomentés par le CAN sur la scientologie", dit-il, il l'informa par téléphone qu'il voulait "entrer dans l'organisation afin de la réformer de l'intérieur".
Ce qui poussa précisément la scientologie à user de ses ressources considérables contre le petit groupe anti-sectaire - en dehors de la vieille haine des scientologues envers le CAN - reste affaire de spéculation; on ne peut toutefois s'en étonner. D'après les règles scientologues, les opposants sont classés parmi le gibier de potence (fair game) et peuvent être attaqués. Les enseignements hubbardiens décrivent bien l'importance de lancer des attaques en justice contre l'ennemi - bien que le but soit plutôt de décourager que de gagner. Par conséquent, les avocats engagés par l'église ont déposé des centaines de plaintes au cours des années. On trouve parmi eux des avocats de haute volée, comme le Président Gerald Chaleff de la commission de la Police de Los Angeles.
L'attaque du CAN ne pouvait être aidée par le numéro de Mai 91 du Time, "Scientologie, secte avide de pouvoir et d'argent". Cynthia Kisser y faisait quelques remarques très désobligeantes sur la scientologie: ses membres ne faisaient pas non plus mystère de leur mépris vis-à-vis de Kisser: on trouvait ainsi, dans un numéro de Freedom magazine - publication scientologue, le titre de la UNE: CAN: le serpent de la haine, de l'intolérance, de la violence et de la mort". On lisait ensuite que le CAN était un groupe de haine dans la tradition du KKK et des néo-nazis, Kisser y étant décrite comme "la mère du serpent". La même publication donnait une autre accusation: Cythia Kisser avait été "danseuse nue" dans un night-club de Tucson, Arizona - accusation estimée grotesque par Kisser. (Mme Kisser refusa plusieurs interviews avec le New Times; ses collègues disent qu'elle est se sent perosnnellement détruite par la disparition du CAN et ce qu'elle perçoit comme un harassement continuel de l'église à son encontre. Elle dit avoir tenté une nouvelle vie et s'est inscrite à une faculté de droit à Chicago.)
Le CAN arriva à continuer à fonctionner pour un temps
en dépit des attaques scientologues. Mme Coates dit que le
groupe recevait environ 20000 demandes d'information par an, et que
la quantité ne changea guère après le début
du tir de barrage légal. Mais le litige consommait de l'énergie
"Il ne fallait pas tant d'expertise légale pour surpasser
l'autre camp, dit Hynk, ancien avocat du CAN. C'était plutôt
une guerre d'usure". En 1993, le CAN en était à
10000 dollars mensuels en frais de justice; Coates indique que cela
aurait été bien plus si le travail n'avait pas été
fait pro bono. Certains des avocats travaillant pour le CAN
doutaient même d'être jamais payés et ne le furent
pas. Mais un problème pire attendait: après que les
assurances aient refusé d'assurer le risque accru, la base
de donateurs s'amoindrit.
Mme Coates dit que les contributeurs répugnèrent peu
à peu à contribuer à un groupe qui dépensait
tant en frais de justice - ajoutant qu'elle comprenait leur point
de vue. Les scientologues titillaient un point faible, là où
l'effondrement pouvait démarrer. Le point crucial s'avéra
être une plainte fort différente des autres: Jason Scott
n'était pas scientologue, mais membre d'une église évangélique,
lorsqu'il fut victime d'une tentative ratée de déprogrammation
à 18 ans révolus. Les circonstances de ce cas ne furent
pas discutées. Sa mère, Katherine Tonkin, deux fois
remariée après la naissance de Jason et mère
de six autres enfants, était rentrée à l'église
du Tabernacle Vivant, petite unité pentecôtiste à
Bellevue, état de Washington. Sa désillusion fut rapide
par rapport aux enseignements de l'église, qui déclarait
que la télé et les films étaient interdits et
décourageait les femmes de porter jeans ou bijoux. Elle quitta
l'église, mais Jason et ses deux frères de 16 et 13
ans choisirent d'y rester.
Ses inquiétudes augmentèrent en 1990, après que les deux aînés aient été pris dans une famille de deux des chefs de l'église, et que son cadet soit reparti vivre chez sa grand-mère. Ne sachant que faire, Mme Tonkin appela une ligne de secours et obtint le numéro de Shirley Landa, bénévole du CAN, qui lui communiqua le numéro de Rick Ross, expert en sectes basé à Phoenix qui avait pratiqué des quantités de déprogrammations. En décembre 1990, il partit sur Seattle, déprogramma les deux cadets, mais Jason fut plus difficile. Il témoignera ensuite que le jour où il fut kidnappé, menotté et poussé dans un break par les trois personnes assistant Ross, il leur cria qu'ils n'avaient aucun droit de faire ce qu'ils faisaient; le témoignage dit qu'ils le baillonèrent et l'emmenèrent sur la plancher du break à quatre heures de là, dans une maison isolée de la côte de Washington. Cinq jours durant, Ross et les autres forcèrent Scott à regarder des vidéos sur des sectes et tentèrent de le faire renoncer à son église; il accepta de leur dire ce qu'ils attendaient. Mais le soir, au repas de "célébration" prévu, il quitta la table et appela la police.
Coates et les autres continuent à dire ce qu'ils ont alors
dit: que le groupe CAN n'était en accord qu'avec des moyens
légaux pour faire quitter les sectes, et qu'il n'aurait pas
accepté sciemment une déprogrammation forcée.
Cette affirmation amène pas mal de doutes chez certains: "Je
crois que l'ancien CAN a fait pas mal de tort en coopérant
ou en expédiant des gens chez ces déprogrammeurs.",
dit Newton Maloney, du Séminaire Théologique de Pasadena.
Maloney, psychologue clinicien et ministre méthodiste, pense
que le nouveau CAN fait oeuvre positive en tentant de réconcilier
les familles avec leurs membres ayant rejoint des groupes qu'elles
n'acceptent pas. Il dit que son point de vue neutre sur le nouveau
CAN à la couleur scientologique lui a valu d'être catalogué
comme apologiste des sectes dans le mouvement anti-sectaire. (L'église
de scientologie, en partie poussée par Maloney, a financé
une conférence sur la tolérance religieuse à
Fuller au début dee l'année, à laquelle le président
scientologue Heber Jentzsch assistait). D'autres vont plus loin encore
dans leur sympathie pour le nouveau CAN. Dans un témoignage
sous serment publicisé par la scientologie, Lowell Stryker,
conseiller des familles et ministre de l'église Unie du Christ
- Caroline du Nord, affirme que 80 % de toutes les déprogrammations
dont il a eu connaissance partaient de l'ancien quartier général
du CAN ou de ses satellites. Sa déclaration a été
réimprimée par l'église de scientologie dans
un manuel intitulé: "The Cult Awareness Network: Anatomy
of a Hate Group"
Le facteur critique de détermination de l'enlèvement
de Jason Scott fut son âge. Eût-il été mineur
comme ses frères, l'incident serait passé quasi inaperçu.
Et bien que le lien soit maigre entre le CAN et le déprogrammeur,
c'est bien une bénévole du CAN qui communiqua l'adresse
de Rick Ross à la mère de Jason. Ross dût faire
face aux accusations de kidnapping, mais lorsque Tonkin admit sa responsabilité
dans l'engagement de Ross, il fut évident qu'il n'y aurait
pas de condamnation. Rares sont les jurés qui jetteraient la
pierre à une mère désirant faire ressortir son
fils adolescent d'une secte suspecte, même si l'un d'eux est
majeur. Mais il se passa autre chose de capital durant le procès
criminel.
Un avocat de Los Angeles appela Jason Scott pour discuter d'un procès au civil contre le CAN. Cet avocat était Marcello di Mauro, collègue de Kendrick Moxon. Peu après, selon les déclarations de Scott, di Mauro venait à Seattle, emmenait Scott dîner, et lui parlait des millions de dollars potentiels qu'une plainte au civil pourrait apporter. Scott ne rencontrera Moxon - qui plaida sa cause - que des mois plus tard, mais il avait pris sa décision. Dès que Rick Ross eût été acquitté des charges de kidnapping pesant sur lui, un avocat scientologue déposa une plainte qui serait le coup de grâce pour le CAN.
L'avocat de la défense du CAN au civil, Mary Steele, acquit rapidement la conviction que la scientologie était derrière le cas Scott et en conclut qu'il serait crucial qu'un jury apprenne les inimitiés anciennes entre CAN et scientologie. Mais à la veille du procès, le Juge de cour de district John Coughenour surpenait la défense en lui interdisant de présenter des preuves concernant la scientologie. En termes tactiques, c'était le raté complet. Le CAN ne pouvait s'offrir de témoins experts, ni même payer le voyage de quelques membres pour témoigner, nous apprend Coates. Pendant ce temps, Moxon et son équipe s'offraient un apologiste des sectes nommé Anson Shupe de l'université de l'Indiana, déjà plusieurs fois expert dans des procès impliquant la scientologie. Il dit au jury avoir passé des années à étudier le CAN et avoir conclu qu'il avait un passé d'attaque des groupes religieux non conventionnels. Le CAN était si bas financièrement qu'il ne put même pas payer l'avocat de la défense. Quand on lui demande si c'est les fonds qui posèrent le problème, Steele répond ne pouvoir décrire à quel point c'était vrai.